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Notre première plongée dans l’Introduction rédigée par Robert Conquest nous a immédiatement mis en contact avec une caractéristique essentielle de son système d’exposition des données qu’il a prétendu recueillir : la confusion temporelle.
Le deuxième paragraphe commence ainsi : « Après le 26 mai 1922... ». Voilà par où nous entrons dans l’Histoire soviétique. Ensuite, après deux lignes et demie de texte, nous passons au paragraphe suivant : « En mars 1921… ». Ce paragraphe s’achève sur une phrase qui commence par : « Et peu de temps avant son attaque… ». Vient le début du paragraphe suivant : « Après sa guérison… ». C’est ensuite le tour du quatrième paragraphe : « Pendant son absence… ». Et c’est alors que survient la première attaque de Conquest contre Staline… Tout est déjà sens dessus-dessous : trois fois, nous sommes allés de l’avant ; deux fois, à reculons.
Or, dans ce paragraphe de onze lignes, il n’y a pas que Staline : ce serait trop simple. Il y a les « subordonnés » de Lénine qui « se comportèrent avec une brutalité inadmissible » : nous ne savons pas dans quel contexte, ni à propos de quoi… Faut-il, parmi eux, ranger Staline qui, au milieu du paragraphe apparaît, comme celui qui « persécutait les communistes de Géorgie ». À quel titre les persécutait-il ? Pour quelle raison ? Sans transition, nous apprenons ensuite que « son émissaire Ordjonikidze avait même frappé leur leader, Kabanidze ». Dans quelles circonstances ? Le fait lui-même est-il avéré ?
Vient le cinquième paragraphe qui aborde, lui et sans crier gare, la question du réputé « Testament de Lénine » , avec tout juste au milieu de ces 17 lignes les « propos obscènes et menaçants à l’endroit de Kroupskaia » qui n’ont aucun rapport avec ce qu’en ont écrit les protagonistes eux-mêmes… Mais grâce à la « formidable » entrée en scène de l’épouse de Lénine, Staline est déjà complètement disqualifié aux yeux du lecteur ou de la lectrice non averti(e), alors qu’ils n’ont encore parcouru que moins de deux pages de l’Introduction… Encore ne quitteront-ils pas ce paragraphe-là sans avoir fait la connaissance du pire ennemi de Staline : Trotski…
Ensuite – nous sommes maintenant dans le septième paragraphe -, nous sautons immédiatement aux « derniers articles » de Lénine. Ils paraissent vraiment n’avoir été écrits que pour faire valoir son total dégoût. Il y attaque la « confusion bureaucratique », la condition « répugnante » de l’appareil d’État. Mais surtout – et c’est ainsi que s’achève cette rapide revue de l’ensemble de la révolution bolchevique telle que Lénine a pu la connaître et la juger :
« Il conclut amèrement : « Nous n’avons pas atteint un niveau de civilisation assez élevé pour passer directement au socialisme bien que nous réunissions toutes les conditions politiques requises. »
Ne s’agissait-il pas, pour lui, d’épingler l’abominable Staline ?
Michel J. Cuny
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